Loi sur les énergies renouvelables : quelles mesures pour les entreprises et collectivités ?

La France a besoin d’accélérer le développement des énergies renouvelables. La loi promulguée en mars 2023 vise notamment une mobilisation des acteurs économiques

Graphiquesur la part des EnR dans la consommation d'énergie des scenarii Transition 2050 de l'ADEME

Retard français sur les renouvelables

Promulguée le 10 mars 2023, la loi sur l’accélération des énergies renouvelables (EnR) vise à rattraper le retard de la France, en particulier sur le solaire et l’éolien. Bien sûr, il faut réduire avant tout : en questionnant les besoins, et en systématisant l’efficacité énergétique. Ponctué par la crise de l’énergie, l’hiver a en effet imposé les efforts de réduction des consommations. Dans les scénarios prospectifs de RTE, Négawatt ou l’ADEME, une part importante de la transition énergétique repose toutefois sur le développement de la production des EnR, indispensables pour décarboner notre mix.

A cet égard, la France est le seul des 27 États membres de l’Union européenne à manquer les objectifs fixés pour 2020. Les EnR représentaient alors 19,1 % de la consommation brute finale d’énergie, en-deçà des 23 % attendus. L’accélération est d’autant plus cruciale que l’UE vient de rehausser ces seuils avec la révision de la directive énergies renouvelables (RED III) dans le cadre du paquet Fit for 55 : d’ici 2030, la part d’EnR devra atteindre 42,5 %.

Image : Transitions 2050 – ADEME

Ce que prévoit la loi d’accélération sur les énergies renouvelables

La nouvelle réglementation vise essentiellement à faciliter le déploiement des installations renouvelables, et à trouver des espaces où les installer. Elle propose ainsi 4 volets principaux :

  • Planifier les projets d’EnR : l’objectif du texte de loi est de cartographier les zones d’accélération potentielles pour installer des EnR sur les territoires, ainsi que les zones prioritaires pour les éoliennes en mer. Le tout grâce à des concertations publiques.
  • Simplifier et accélérer les procédures : différentes mesures de la loi d’accélération sur les énergies renouvelables visent à réduire le temps de déploiement des projets pour se rapprocher de la moyenne européenne. Ainsi, une présomption de reconnaissance de la raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM), qui permet de déroger à l’obligation de protection des espèces protégées, sera instituée pour certains projets de production d’ENR, selon des conditions à définir. Des référents préfectoraux à l’instruction des projets renouvelables seront aussi désignés pour faciliter les démarches administratives, ainsi que des médiateurs des EnR pour trouver des solutions amiables en cas de désaccords.
  • Libérer le foncier nécessaire : dans l’optique de lutter simultanément contre le réchauffement climatique, l’artificialisation des sols et la perte de biodiversité, on donne priorité aux installations sur du foncier déjà artificialisé ou ne présentant pas d’enjeux environnementaux majeurs (ex. parking, toits, terrains dégradés, aires et bretelles d’autoroutes). L’agrivoltaïsme devrait également se développer sous certaines conditions.
  • Mieux partager la valeur : le texte prévoit un partage des bénéfices économiques avec les riverains et communes d’installation, facilite l’autoconsommation pour les collectivités, et encourage le développement de contrats directs entre consommateurs et producteurs d’énergie.

Quelles implications concrètes pour les acteurs économiques ?

Concrètement, les grandes entreprises publiques et sociétés de plus de 250 salariés devront mettre en place un plan de valorisation du foncier d’ici février 2025, et équiper certaines zones de panneaux solaires :

  • La moitié de la surface des parkings extérieurs existants de plus de 1 500 m2 devront être couverts d’ombrières d’ici juillet 2028, et dès 2026 pour les parkings de plus de 10 000 m2 ;
  • Au moins 30 %, 40 % et 50 % des toitures de bâtiments devront être équipées de systèmes de production EnR ou de végétalisation, respectivement d’ici juillet 2023, 2026 et 2027. Cette obligation concernera les bâtiments non résidentiels neufs ou lourdement rénovés ayant une emprise au sol de plus de 500 m2.
  • Il en sera de même à partir de 2028 pour les bâtiments non résidentiels existants ; la surface de toiture dédiée à la production d’énergie reste cependant à déterminer.

Pour les supermarchés et magasins, sociétés de services, bureaux et bâtiments publics, cette obligation représente l’opportunité de valoriser son foncier, réaliser des gains économiques et accroître sa sécurité énergétique, grâce à l’autoconsommation individuelle, voire collective.

Vue en plongée d'un site industriel

Du côté des acteurs industriels notamment, développer les projets de production d’EnR peut aussi passer par d’autres sources. Moins évoquées dans les mesures de la loi, elles sont au moins aussi importantes, en particulier pour décarboner la chaleur. Il s’agit par exemple de récupérer la chaleur fatale, qui représente environ un tiers de l’énergie consommée par le secteur industriel. Méthanisation et biomasse sont aussi des pistes à explorer pour ceux qui disposent de résidus organiques. À l’échelle d’un territoire, des synergies intéressantes peuvent s’opérer entre acteurs publics et privés, pour créer des boucles énergétiques locales, via des réseaux de chaleur, par exemple.

La loi sur l’accélération des énergies renouvelables, doublée de celle sur le nucléaire, donne un avant-goût des débats qui devront s’ouvrir ces prochains mois, pour définir la nouvelle stratégie nationale énergie-climat. Les acteurs économiques devront y être attentifs, mais peuvent poursuivre leur transition énergétique sans attendre. Ce sont autant d’économies et de résilience énergétiques assurées pour eux.