Plan de relance : moins saupoudrer pour mieux impacter

Le plan de relance consacre des montants significatifs à la transition écologique et c’est encourageant. Pour mieux préparer le pays à relever les défis des prochaines décennies, il faudra oser concentrer ces soutiens sur des projets aux ambitions écologiques très fortes, et ne pas saupoudrer les aides sur trop d‘actions sans effet de levier

Éviter de saupoudrer les aides

Présenté par le gouvernement français jeudi 3 septembre, le plan de relance consacrera un tiers de ses 100 milliards d’euros à la transition écologique. Cette part cible en priorité la rénovation énergétique des bâtiments, les transports, l’énergie, et dans une moindre mesure l’agriculture et l’alimentation. Voyons le verre à moitié plein. Même si l’inverse aurait été inquiétant 10 ans après la crise de Lehman Brothers, jamais un plan de relance n’a été aussi écologique.

Pour avoir un vrai effet de levier sur la transformation du pays, il faut à tout prix éviter de saupoudrer l’aide sur trop d’acteurs et de projets écologiques aux ambitions molles. Même si les montants sont significatifs, il n’y en aura pas pour tout le monde. A l’État et aux collectivités d’avoir le courage de refuser de soutenir ceux qui ne vont pas assez loin, et qui n’emmènent pas franchement vers une trajectoire régénérative. 

Des critères plus radicaux

Oser choisir, c’est faire des sacrifices, mais c’est aussi mieux nous préparer collectivement, si l’on s’appuie sur des critères d’éco-conditionnalité nets et forts. Nombre d’observateurs les jugent timides à date, mais il n’est pas trop tard pour radicaliser les modalités d’accès à ces fonds.

La rénovation énergétique est passée de la cinquième à la première roue du carrosse. C’est une bonne nouvelle supplémentaire, mais quelles seront les conditions posées à des subventions ? Exiger des garanties de performances énergétiques des travaux réalisés sur un temps long, et ne soutenir que des projets aux ambitions énergétiques élevées forcera le développement de solutions plus innovantes et vertueuses. L’impact sera beaucoup plus fort pour la structuration de la filière, si l’argent est réparti significativement pour rénover moins de bâtiments, mais avec des ambitions fortes et garanties, que si l’on donne 1 000 à 2 000 € pour chaque logement rénové.

Du côté de la mobilité, vaut-il mieux offrir 1 000 € de prime à tout acheteur de véhicule hybride, pour permettre aux constructeurs de vider leurs stocks, ou soutenir beaucoup plus massivement le développement d’une gamme de véhicules très légers ou à hydrogène ? Pour faire évoluer nos transports de façon efficace et pérenne, l’État et les collectivités devront aussi trouver le juste équilibre entre investir dans les équipements (vélo et voiture électrique), mais aussi dans le déploiement des infrastructures (pistes cyclables et bornes de recharge).

Nous placer sur la bonne trajectoire

Un plan de relance vise bien sûr à soulager les douleurs à court-terme et relancer l’économie sur deux ans, mais anticipons aussi l’héritage qu’il nous laissera dans vingt ans. Plutôt que de donner des béquilles pour quelques mois, musclons durablement les acteurs qui contribueront à l’avenir que nous souhaitons, et ne perdons pas trop de temps à subventionner des solutions de moindre mal, certes meilleures que celles d’hier, mais qui ne contribueront pas sérieusement à nous mettre sur la bonne trajectoire.

Rappelons qu’une partie de l’argent versé viendra d’emprunts européens. La Commission, elle aussi, sera attentive à ce que les 30 % de budget fléchés vers la transition écologique soient alignés avec les critères écologiquement exigeants de son projet de « taxonomie verte ».

Exiger des éco-conditionnalités radicales pour soutenir des projets concrets et avec un impact durable sur nos territoires est le meilleur service que nous pouvons rendre à l’économie pour la préparer aux défis de demain. Osons moins saupoudrer pour mieux impacter.